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Les sources iconographiques
des portraits fictifs du père jésuite Jacques Marquette


1896 Sculpteur Anonyme - Architecte Henry Yves Cobb

Photo : collaboration de Ruth D. Nelson.

Henry Ives Cobb est l'architecte du 632 N. Dearborn terminé, en 1896, pour la Chicago Historical Society qui, aujourd'hui, occupe d'autres locaux sous le nom de Chicago History Museum. Il serait intéressant de connaître le sculpteur qui a insufflé vie à la pierre. Il y manifeste la verve et la gouaille d'un conteur digne de l'art néo-roman dont l'édifice s'inspire. Il puise à des sources savantes, mais son récit relève de l'art populiste des parvis de cathédrales.

Ce très intéressant bas-relief de granite décore l'imposte de la porte en façade. L'intérêt historique déjà marquant suscité par Marquette, lors de la récente construction du Marquette Building en 1895, se dévoile ici comme un prise de position quasi pamphlétaire de l'occupant des lieux. 2012 Nelson, p. 213-214, rapporte que « much of the enthusiasm for Marquette was generated by the Chicago Historical Society », qui s'était vivement intéressée à l'excavation de la tombe de Marquette à St. Ignace (Michigan) en 1877. La thématique artistique se poursuivait à l'intérieur de l'édifice « with duplicate bronze casts of Kemeys' Indian portraits and MacNeil's bas-reliefs of Marquette's life », deux sculpteurs qui avaient oeuvré au Marquette Building.

Photo : collaboration de Ruth D. Nelson.

La physionomie de Marquette, debout sortant d'un canot, glabre, mais chevelu et hirsute, tout en rappelant celle de 1869 Lamprecht est prémonitoire du fort mouvement dont 2005 Knepper accentuera le personnage. Il porte sa croix au bout du chapelet lié à sa ceinture de corde dont on ressent pratiquement le balancement dans la manoeuvre. Sa curieuse chevelure semble dériver des ailes de Mercure et rayonne derrière lui en une longue tignasse flottant au vent. Mercure, dérivant de l'Hermès grec, convient bien à Marquette, car il est le dieu du commerce, des voyages et messager des autres dieux dans la mythologie romaine. La main gauche de Marquette est repliée sur son coeur. Il touche l'Amérindien de sa main droite. Celui-ci, fesses nues et jambes partiellement immergées dans l'eau, soutient Marquette à la cuisse pour l'aider à descendre du canot, tout en consolidant l'embarcation de sa main droite. La nudité totale de cet Amérindien, uniquement couronné de plumes, peut référer à la pureté du bon sauvage et de cette nature vierge découverte par les explorateurs.

Étonnamment, la tête de Jolliet semble nimbée, par la bordure intérieure de son chapeau, à la manière des héros divinisés de l'antiquité puis des saints ! Fortement barbu et chevelu, il est doublement armé : d'une carabine à sa main droite et d'un fusil à la ceinture. Un chien, la patte levée, s'approche affectueusement de son pantalon, ce qui ajoute une touche inusitée de familiarité naturaliste à la scène, tout comme les quenouilles et autres plantes stylisées.

Marquette et Jolliet sont donc présentés ici comme des explorateurs en plein mouvement : l'histoire en marche qui apporte un message divin dans le cadre de leur vie quotidienne. Ce qui est loin d'être étranger à l'activité du premier occupant de cet édifice aujourd'hui consacré à des activités commerciales plus prosaïques. Rendons hommage au sculpteur qui a doté Marquette, dans l'une de ses premières représentations, d'une iconographie mythologique forte et inusitée, en symbiose tant avec le style de l'immeuble que des activités de son premier occupant.

Collaboration de Ruth D. Nelson.

I followed up with the Chicago History Museum regarding the bas-relief entrance of the Henry Ives Cobb building, and this was their response:

« Thank you for your inquiry. So far, I'm afraid I haven't been able to find any information about the name of this sculptor. I've checked the landmark reports, and while these do mention and describe the sculpture itself, there is no mention of the sculptor. I've also checked other reference sources and the online Chicago Tribune database, again with no luck.

We do have original architectural drawings of the building, which are currently stored at our off-site warehouse, which we'll probably visit next month; when we do, I can check the drawings. The drawings are listed as being elevations of the building, so it's unlikely that there will be any information about the sculpture; however, I will check and get back to you. »

 

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